Der Amphibienmensch
Kritik in AUX ARTS ETC – la plate-forme culturelle pour Zurich et la région; 6. 3. 2008
Entrant dans la salle nous sommes déjà en présence d’un tableau vivant à 3 dimensions et l’œil vaque d’un point à l’autre de la scène jusqu’à l’arrière-plan où des fragments de film tiennent lieu de coulisses à la fois fixes et mobiles. L’univers poétique original de M. Schröder / kraut_produktion se concrétise d’abord par le décor et les costumes : matériel pauvre, démodé et excentrique, qui signifie la folie nostalgique d’un scientifique errant dans ses fantasmes (Thomas Douglas) et de son alter ego, «l’homme-amphibie» (Philipp Caspari) créé de toutes pièces (un poisson et une poupée y suffisent). Que se passe-t-il quand l’homme n’est plus un homme et tombe amoureux d’une femme qui n’est plus une femme ? Il se met à chanter avec une voix de contre-ténor son étrangeté au sexe incertain, monstre et enfant ‘‘outre-terre’’ en déficit d’amour. La musique (originale de Ilja Komarov) mène la danse, impossible entre ces créatures privées d’identité (sexuelle). Chants (Unter der Oberfläche, Bizarr, Auf Ihren Lippen, etc. en bel allemand) et musique conduisent lentement (trop lentement ?) les protagonistes d’une scène à l’autre, alternant avec le jeu, le mime plutôt des acteurs (qui malheureusement devient parfois mimiques entendues…): une histoire d’amour fou et d’amours folles.
Kraut_produktion poétise le théâtre, non seulement en le mettant en musique, mais en produisant des situations, des images et finalement du sens, auquel le texte participe comme les autres éléments de la mise scène. C’est ce qui fait la force de ce spectacle. Il touche les sens, excite l’imagination et, ce faisant, donne à penser.
Laurent Gaillard